Grande-Gueule le cachalot.

Il était une fois un cachalot nommé Grande-Gueule car il pouvait l’ouvrir d’une manière incroyable. Cependant, complexé, ce cachalot ne voulait pas être désigné sous le nom de… C.A.C.H.A.L.O.T. et préférait qu’on l’appelât baleine, ces êtres aux merveilleux sourires.

Un jour, Grande-Gueule remonta en surface pour respirer (car les cachalots, comme les baleines, ne sont pas des poissons mais des mammifères marins très forts en apnée). « Tiens, se dit-il, c’est drôlement agité en surface… » Il bâilla, ouvrant ainsi sa large bouche, et… « Glups ! Je crois que j’ai avalé quelque chose… » Aussitôt, Grande-Gueule alla voir la Sage du Corail, qui vivait tout au fond de l’eau, et dont on disait qu’elle était aussi âgée que la Terre. « Avale cette poudre, que je vois ce que tu as absorbé », lui dit-elle. La Sage du Corail put, grâce aux propriétés scintillantes de la poudre, examiner cette chose de la surface. « Mhm… Je vois ce que c’est… » Elle fouilla dans son fourbi grâce à ses multiples bras, et en sortit un très lourd livre. « Ici sont décrits et dessinés tous les êtres vivants de notre monde et de la surface passés, présents et à venir. L’être que tu as absorbé est un humain. Or, les humains qui s’aventurent le plus au bord de notre monde sont des marins. Pour les faire sortir, il suffit qu’une sirène chante, car aucun marin ne peut résister au chant des sirènes. » La Sage du Corail demanda à une assistante sirène de monter en surface en compagnie de Grande-Gueule et de chanter. Toutefois, l’humain ne sortit pas. Vexée, la sirène ramena Grande-Gueule à la Sage du Corail et expliqua que le stratagème n’avait pas fonctionné. « Ne t’en fais pas, sirène, c’est tout simplement parce que cet humain n’est pas un marin… » La Sage du Corail colla son oreille contre le ventre de Grande-Gueule : l’humain chantait. « Très bien, grâce à son chant, j’ai pu identifier la langue de cet humain, et avec un peu de trigonométrie, je peux même dire d’où il vient ; tu vas donc pouvoir le ramener sur son rivage. Voici un peu de poudre spéciale : ne l’avale pas tant que tu n’es pas en vue de la terre. Un assistant crabe va t’accompagner. »

Aussitôt dit, aussitôt fait. La Sage du Corail prit deux coques vides, y mit deux poudres, précisa que celle qui devait être prise en premier se trouvait dans la coque noire, et les donna à l’assistant crabe. Grande-Gueule, le crabe sur le dos tenant les coques, se dirigea vers le rivage, guidé par des planctons scintillants. Enfin, quand la terre fut en vue, il ingurgita la première poudre, s’échoua et ouvrit très grand sa bouche. L’humain en sortit, le crabe mit la deuxième poudre sur la langue de Grande-Gueule, qui put ainsi faire monter l’eau là où il était et repartir. Désormais, Grande-Gueule fait toujours attention d’être seul au milieu de l’eau pour bâiller en surface. Il se promène en souriant avec des algues devant la bouche pour faire croire qu’il est une baleine, et vit même une belle histoire d’amour avec une baleine bleue.

N.B. : cette histoire est connue en surface ; du point de vue humain, on la raconte sous le nom de Jonas et la baleine (comme quoi Grande-Gueule a réussi à se faire passer pour une baleine !^^).

Vous l’avez compris, c’est le retour du cycle Nourriture Humaine ! Alors, à table !